Le journal de Renée Largerie
Mercredi 12 avril 1730
Je n’ai pas écrit un mot dans mon journal au cours de l’année 1739. Ce qui n’est pas très bon signe en ce qui concerne mon humeur. Des idées noires m’ont torturée, sans véritable raison. Il est des mélancolies gaies quand on revient sur un passé heureux. Mais il en est aussi qui pèsent sur l’humeur comme de lourds ennuis. Les jours alors se traînent, plus noirs que les nuits.
Bizarrement, c’est une catastrophe pour mon mari qui me fait sortir de ce cachot humide dans lequel depuis des mois je me morfonds. Depuis quelque temps déjà, il a investi inconsidérément dans la Compagnie des Indes. La remise en ordre après le limogeage du contrôleur général et les fortes économies ont fait fondre notre modeste fortune.
Gaspard peine à sortir d’un désespoir qui me surprend. Et comme pour les plateaux d’une balance, sa plongée dans le noir éclaircit un peu mon horizon. L’argent pour moi n’a guère d’importance, sans doute parce que je ne suis pas chargée d’en gagner. Mais la santé de mon mari ne me laisse pas indifférente.