
Le Journal de Renée Largerie
Samedi 05 mai 1708
Il n’y a guère de sens à comparer des douleurs. Notre petit Joseph est mort. On ne s’habitue jamais à la disparition d’un de ses enfants, même si j’ai connu plusieurs fois ce genre d’épreuves. Mais le désespoir de Gaspard m’a bouleversée. Son premier enfant, son fils… Je tentais de le faire sortir de sa douleur en lui parlant de la nouvelle vie que j’avais dans mon ventre. J’essayais même de lui faire sentir les mouvements de l’embryon. Rien n’y faisait.
Sa maison, ses souvenirs, sa vieille domestique même, n’avaient plus aucune prise sur lui. Quand il me dit qu’il voulait quitter Ernée, je tentai de l’en dissuader même si un retour à Gorron ne pouvait que me réjouir. Il n’en parla plus pendant quelques semaines et hier il m’annoncé qu’il avait trouvé une maison, Grande Rue à Gorron. Je dissimulai ma joie qui aurait pu choquer alors que le corps de notre fils reposait dans le cimetière d’Ernée.