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13 juillet 2014 7 13 /07 /juillet /2014 10:33

La chute

L’humeur qui est la nôtre à l’entrée dans le sommeil, doit en moduler la qualité. Je ne me souviens d’aucun rêve particulier. Et quand j’ai vu le jour filtrer au travers des persiennes, j’ai à peine senti mes douleurs habituelles. Une belle journée, donc, qui devait s’annoncer. Sans doute trop enthousiaste, j’ai bondi de mon lit. Enfin, je me suis levé un peu plus vite que d’habitude. J’avais à peine fait trois pas quand mes genoux se sont dérobés. C’était la première fois que je perdais connaissance. Sensation étrange. Pas de douleur particulière même dans la chute. Un bruit qui me parut énorme quand mon crâne heurta le carrelage. Et puis l’émergence lente et somme toute agréable d’une nouvelle conscience. Cet état floconneux dura peu. Tout revint brusquement : le pied qui sournoisement avait changé de gêne, la tendinite réveillée par la chute, les serrements envahissant cette fois toute la poitrine et cette tête qui tourne entraînant une franche envie de vomir. Je me suis traîné difficilement jusqu’à mon lit et c’est là que m’a trouvé la ménagère qui s’occupait chaque jour de mon domicile. Tout est allé ensuite très vite. La mairie alertée. Plusieurs voitures à ma disposition. J’ai demandé alors à voir le jeune médecin. Il paraît que cela a plongé dans la stupeur le personnel, malgré leur sincère inquiétude. J’ai imaginé alors la tête de mon brave docteur et, bizarrement, je n’ai eu aucun remords.

C’est le premier adjoint qui l’a emporté. Son véhicule est le plus confortable, paraît-il. Après m’avoir demandé si tout allait bien, il ne s’est plus intéressé à moi. Comme si j’étais déjà sorti du monde des vivants. Il faut dire que des choses plus importantes que ma santé précaire venaient d’arriver. Les ambassadeurs de France et de Grande-Bretagne ont adressé un ultimatum à la Chancellerie allemande. Cela revient à déclarer la guerre à l’Allemagne. Le premier adjoint n’a cessé de parler à son chauffeur. Il développait sa position. Profitant que son employé n’osât le contredire pour écrire l’histoire à sa façon. La France a eu raison de frapper un grand coup. Hitler avait besoin qu’on lui montre notre force. Il n’osera pas s’attaquer à la puissance française. Tant pis si les Polonais ont été balayés. Ce n’est plus notre problème. Nous sommes bien à l’abri de notre ligne Maginot. Laissons les choses se tasser. Et reprenons des relations normales avec l’Allemagne. Même si on ne m’a pas demandé mon avis, même si mon état général n’était guère fameux, j’ai continué, seul, à réfléchir sur la situation internationale. Il me paraît évident qu’Hitler n’est aucunement impressionné par notre force armée. A-t-il déjà prévu de nouvelles attaques ? Personne ne peut l’affirmer. Alors, que faut-il faire ? J’ai accepté les risques de la guerre. L’ultimatum me paraît une bonne chose. Mais en toute logique, la France et l’Angleterre ne peuvent en rester là. Si Hitler n’est pas impressionné, s’il a des visées sur d’autres territoires, seule la force pourra l’arrêter. Et cette force il faut la montrer avant qu’il ne prenne l’initiative. Et pour cela il faut défendre les Polonais. Etrange tout de même me voilà plus belliqueux que mon premier adjoint. Quel renversement…

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